MOUVEMENTS TERFS ET EXTRÊME DROITE

Ces dernières années, les positions transphobes, les individu·es ou mouvements TERF (Trans Exclusionary Radical Feminist, en français : «féministe radicale
excluant les personnes trans») gagnent du regain et prennent de plus en plus de place sur le territoire français. A travers la sphère médiatique ou politique, les réactionnaires, identitaires, éco-essentialistes, femellistes, traditionalistes, et conspirationnistes, tentent d’infuser leur idéologie toujours plus nauséabonde. Qui sont-iels et quelles sont les visages du réseau transphobe ? Comment fonctionnent-iels ? Quels sont leurs liens avec l’extrême droite ?

Avant d’apporter quelques explications, voici une définition de l’abréviation TERF : groupes de femmes qui rejettent l’idée de la fluidité du genre et qui catégorisent les êtres humains en fonction du sexe qui leur est assignée à la naissance. Elles défendent des positions essentialistes, transphobes, et excluantes puisqu’elles refusent l’inclusion des femmes et hommes transgenres dans les espaces de non-mixité et s’opposent aux droits des personnes transgenres.

De la gauche confusionniste à l’extrême droite, les profils sont variés, pourtant, ils se recoupent facilement. Partons de cette gauche se revendiquant comme
éco- essentialiste.

En 2011, Deep Green Résistance (DGR), naît outre atlantique sous l’impulsion de Derrick Jensen, Lierre Keith, et Aris McBay. Cette organisation présumée «écologiste» appelle à la restauration des écosystèmes par une accélération de l’effondrement de la civilisation industrielle. DGR et ses théoriciens comme Jensen souhaitent participer activement à cet effondrement. L’organisation arrive en France en 2015, principalement grâce au blog de Nicolas Casaux, «Le Partage», et s’implante en Bretagne, à Rennes.

Casaux revendique l’influence de Jensen, ou des publications comme le podcast Floraisons. Sur «Le Partage», il rédige des articles sur JK Rowling, autrice
devenue porte-parole d’une idéologie transphobe, ou relaye des textes de Meghan Murphy.

Récemment, le 16 mars dernier, il faisait le parallèle ignoble entre nazisme et transidentité.

Est-ce si étonnant que cela lorsqu’on s’arrête sur la définition de l’essentialisme ? Pour Peter Gelderloos, activiste, théoricien anarchiste, et auteur : «Comme la
plupart des transphobes, Casaux adhère aux visions essentialistes de la nature et des corps». Ausma Zehanat Khan décrit dans The Unquiet Dead : «l’essentialisme dans ces deux formes est un élément clef du fascisme, il l’a notamment été dans le mouvement Völkisch, prémisse de l’idéologie Nazi. L’essentialisation des corps et de la nature tend à être utilisée dans des versions racistes et transphobes du féminisme.»

Le podcast Floraisons est une des principales plateformes de diffusion des idées transphobes de DGR et de Casaux. On y retrouve notamment la participation de Pièces et Mains-d’œuvre (PMO). Ce collectif isérois, crée originellement pour critiquer le complexe militaro-industriel, a dérivé vers l’homophobie et la transphobie.

Le sociologue Matthijs Gardenier souligne : «La critique de la technologie amène le courant anti-tech à s’inscrire dans une défense de ‘’la naturalité’’ dans ce qui concerne la contraception, la PMA, la GPA, etc. (…). Pièces et
Mains-d’Oeuvre, pourtant proche des milieux anarchistes et autonomes, se font le relais de thématiques proche des argumentaires de la Manif pour tous.»

Floraisons contribue également à la propagation des textes transphobes d’Andrea Dworkin ou de Janice Raymond. Iels soutiennent des personnalités les plus plus véhémentes et active de la transphobie au Royaume-Uni, comme JK Rowling, Julie Bindel, ou Maya Forstater.

D’autres invidivu·es se revendiquant de «gauche» n’hésitent plus à attaquer de front la communauté transgenre. Parmi elles, on retrouve Marie-Jo Bonnet, 75 ans, ex-militante de MLF (Mouvement de Libération de la Femme) et des Gouines Rouges (mouvement féministe lesbien).

Aujourd’hui, elle fait partie du conseil scientifique «L’Observatoire de la petite sirène». Une structure qui prétend être un lanceur d’alerte sur les mineurs trans. Cette organisation, en réalité, lutte contre les enfants et adolescentes transgenres et pour le familialisme hétéro. Mediapart avait déjà mis en lumière, dans un article, les positions transphobes et réactionnaires de cet observatoire.

Pour Stern, ex-FEMEN et fondatrice du mouvement des collages contre les féminicides, elle commence à être ouvertement transphobe début 2020 en réaction au slogan «Des sisters pas des cisTERF». En 2022, elle crée avec Moutot, la plateforme Femelliste, où elles déblatèrent leurs positions face à la transidentité.

Stern marque un virage identitaire en se rapprochant de Julien Rochedy, ex-conseiller politique du RN, fasciste, masculiniste, et soutient de Re-conquête. Cet individu est un ami proche de Loïk Le Priol, ancien militant du GUD, et assassin de Federico Martin Aramburu.

Moutot de son côté, fondatrice du compte « T’as joui ?», critique la contraception et soutient fidèlement le masculiniste suprémaciste blanc Jordan Peterson. Elle partage également les thèses de la conspirationniste transphobe américaine Jennifer Bilek.

En 2021, Moutot et une autre militante TERF étaient reçues en grande pompe par Marlène Schiappa, alors ministre déléguée chargée de la Citoyenneté. Elles avaient présenté un dossier au sujet des problématiques sur l’idéologie de genre reprenant les thèses préférées des TERF. Suite à son entrevue, Moutot annonçait sur ses réseaux avoir été «très bien reçue» et s’être «sentie écoutée» par Schiappa. Cette rencontre intervenait au moment même où le Sénat venait d’ajouter des amendements anti-trans dans la proposition de loi visant à interdire les thérapies de conversion.

Est-ce une simple coïncidence ? Au vu des positions de Moutot, il est légitime de se dire qu’elle représente la caution réactionnaire de l’exécutif macroniste, de la droite extrême, et de l’extrême droite.

En 2022, avec Stern, elles publiaient une nouvelle tribunetransphobe dans Marianne, en ciblant une affiche du Planning Familial : «Mme Élisabeth Borne, féministes, nous nous inquiétons de ce que devient le Planning familial». Rappelons tout de même à ses deux femellistes, qu’une des missions du PF est d’accompagner les personnes transgenres et non-binaires !

Si les idées réactionnaires et identitaires de Stern et de Moutot ne sont plus à démontrer, ils permettent à l’extrême droite politique et médiatique, d’occuper le
devant de la scène.

Le collectif Némésis, sous couvert de féminisme de droite, défend en réalité le modèle patriarcal. Il est proche notamment des journalistes d’extrême droite, Eugénie Bastié et Charlotte D’Ornellas. À l’automne 2022, cette dernière devait initialement débattre avec Moutot lors de la soirée de lancement d’Omerta, et à la suite de la vidéo «Trans» d’Amélie Menu (ou Pauline Fauré).

En faite, Moutot, on la retrouve un peu partout, du moment qu’elle peut déverser sa haine transphobe et graviter autour d’individues peu fréquentables.

En 2022, via l’association Régénère, du gourou sectaire Thierry Casasnovas (anti-IVG et complotiste), elle avait pratiqué du woofing dans sa ferme. Sur X, elle expliquait : «Curieuse que je suis, j’ai voulu voir par moi meme si j’allais me retrouver dans une secte ! Très déçue, je n’ai fait que récolter des tomates et des haricots verts !»
Pourtant, quelques mois après cet épisode, Casasnovas, youtubeur crudivoriste, est interpellé, après plus de 600 signalements à son sujets depuis 2016. Il est placé en garde à vue pour «emprise mentale», «exercice illégal de médecine», et «escroquerie».

Sur ses vidéos, Casasnovas promet qu’un bras amputé peut repousser après la digestion d’un jus, que manger cru soigne tout, de la boulimie au diabète, en passant par les cancers. Dans une vidéo, supprimé depuis, il déclarait : «Je suis intégriste au possible, traditionnaliste… J’ai l’air cool comme ça, mais c’est un cheval de troie.»

Visiblement, chez Moutot ou Stern, il est difficile de choisir ses fréquentations, entre identitaires, réactionnaires, traditionalistes, et complotistes.

Les partis politiques ne sont pas en reste, que cela soit chez Re-conquête ou chez le RN. Le 12 mars dernier, l’eurodéputée allemande, Christine Anderson, alliée du RN, se lançait dans une diatribe transphobe, approuvée par Jordan Bardella, tête de liste aux prochaines européennes. Pour rappel, Anderson est membre du parti allemand AfD, contre lequel plus de 1,4 million de personnes ont manifesté dans les rues, en janvier 2024.

Bien sûr, on n’oublie pas les traditionalistes de Civitas, de La Manif Pour Tous, avec en tête, Aude Mirkovic, connue pour ses prises de position contre l’avortement, le
mariage pour tous, la PMA, ou encore la transphobie.

Pour conclure, on vous invite à participer nombreux·ses, le 20 mars 19H, à la rencontre organisé par la CALE, intitulée Mouvements TERFS et extrême droite !