Le vendredi 10 mai, nous avons pris connaissance comme plusieurs d’entre vous d’une tribune rédigée par Damien Girard, élu Les Écologistes-EELV d’opposition à Lorient, dans les colonnes de Libération : « Extrême droite : la digue bretonne se fissure, elle ne doit pas céder ». Si le titre tire un signal d’alarme incontestable, il est important d’y apporter réflexion et pragmatisme.
Dès les premières lignes de la tribune, Damien Girard salue la mobilisation de la préfecture de police de Paris quand à l’interdiction de la manifestion néo-nazie du C9M. La même préfecture qui violente des manifestant·es, la même préfecture qui assigne à résidence, fiche et enferme des militant·es, la même préfecture qui interdit nos manifs, qui pourchasse sans cesse les exilé·es et qui jette des familles à la rue.
Il paraît plus qu’évident de ne plus attendre de quelconques miettes venues d’en haut et de ne pas faire le jeu des pouvoirs autoritaires en place.
Nous rappelons que le tribunal administratif de Paris a suspendu l’interdiction de la manifestation néo-nazie du C9M. Plusieurs centaines de partisan·es d’extrême droite ont ainsi pu défiler au nez et à la barbe d’un pouvoir en place toujours plus aux abois. Pire, Valérie Hayer,candidate aux Européennes pour la macronie, n’a pas
hésiter à prendre la pose avec elleux.
Depuis plusieurs semaines, l’État français fait preuve d’une violente répression envers nos forces sociales. De multiples convocations, gardes à vue, ou plaintes ont lieu. Les exemples sont nombreux !
À travers tout le territoire, des manifestantes sont convoqué·es pour un cessez-le-feu et une paix durable en Palestine. Des syndicalistes sont placé·es en garde à vue et poursuivie·es pour avoir défendu·es leurs droits de s’exprimer. Une dizaine de défenseureuses de l’hôpital public de Carhaix sont convoqué·es sous le régime de la garde à vue. Ritchy Thibault, militant antifasciste, est convoqué le 3 juin prochain pour avoir dénoncé le RN, parti d’extrême droite.
En parallèle, les groupuscules d’extrême droite se décomplexent et prospèrent sans ne jamais être inquiétés par l’État français. À Lorient, cela dure depuis plus de deux ans déjà.
En octobre 2022, bien avant les agissements de Callac et de Saint-Brévin, des inscriptions royalistes, fascistes, nationalistes, et LGBTphobes apparaissent dans les
quartiers de Bodélio et de Nouvelle-Ville. En mars 2023, des camarades syndicalistes sont attaqué·es avec une arme à feu, puis gazé·es, près d’un bar du centre-ville. En juillet 2023, une milice d’extrême droite prête main forte à la police lorientaise. À leurs côtés, sont formellement identifiés plusieurs partisans de groupuscules d’extrême droite, dont un ex-saisonnier de l’ASVP de Lorient.
En décembre 2023, des inscriptions sous « faux drapeaux » (ou false flag) sont taguées sur une fresque de l’UBS Lorient. Quelques jours plus tard, le syndicat étudiant de l’Union Pirate Lorient est menacé de mort par arme à feu dans une vidéo, le propriétaire du compte YouTube, Briec L. est une nouvelle fois identifié.
En janvier 2024, un camion d’une société professionnelle est ciblé de tags nationalistes et nazis dans le quartier de Nouvelle-Ville à Lorient.
Plus récemment, en mai 2024, le meeting de l’insoumise, Mathilde Panot est visé de tags nationalistes et de stickers. Les tags sont signés de la « BRD NATIO » (brigade nationaliste), le O cerclé d’une croix celtique.
À proximité, on retrouve un sticker représentant le collaborationniste notoire de la seconde Guerre mondiale, Robert Brasillach. Les mêmes stickers que l’on retrouve près de l’UBS de Lorient !
Il n’y a peu de doute sur les auteurs de cet agissement. À leurs têtes, on retrouve un certain Maxime, présent lors de la milice raciste lorientaise en juillet 2023 et actif au sein du groupuscule « Brigade Nationaliste ».
Le 8 mai dernier, lui et sa clique de fascistes étaient présentes lors des commémorations lorientaises pour la fin de la Seconde Guerre mondiale et la capitulation de l’Allemagne nazie, sans ne jamais être inquiétés.
Pourtant, deux jours auparavant, ils ne faisaient pas prier pour sticker à la gloire de la collaboration.
Mais revenons à cette tribune. Il est regrettable de ne voir mentionner à aucun moment l’antifascisme, pourtant indissociable de nos luttes communes. Si aux yeux des réformistes, seule la lutte par les moyens légalistes seraient légitimes, le combat antifasciste ne doit pas être mené dans un cadre mené par les institutions et le
système en place, car ce sont ces institutions qui produisent du fascisme.
Des solutions existent, quelques pistes et exemples nous viennent en tête. À Rennes, une AG antifa, très efficace, brasse énormément de monde. Dans les Côtes-d’Armor, un front commun réunissant partis politiques, syndicats, associations ou collectifs, a été lancé en janvier 2024 à Saint-Brieuc. Cette initiative a permis de rassembler plus de 2 500 manifestant·es, le dimanche 21 avril. Le 8 février 2024, un collectif régional pour une riposte judiciaire s’est créé. En quinze mois, il a recensé pas moins de 54
intimidations et agressions sur le territoire breton.
VISA (Vigilance et Initiative Syndicale Antifasciste) existait déjà dans le Finistère, trois autres groupes nés dans la région courant 2023 : dans les Côtes-d’Armor, en
Loire-Atlantique et en Ille-et-Vilaine.
Dans le pays lorientais, le CAM (Collectif Antifasciste du Morbihan) et la CALE (Collectif Antifasciste de Lorient & Environs) existent, organisent de nombreuses réunions publiques et conférences. Pourtant, on ne voit quasiment jamais de militant·es Les Écologistes-EELV présent·es à ses événements, hormis lorsqu’iels sont invité·es.
Rejoignez-les, mobilisez-vous à leurs côtés !
Vous avez raison, Damien Girard, il est temps de réagir et de dépasser les clivages. L’heure n’est plus à séduire un électorat de centre-gauche, frileux des questions
antifascistes, antiracistes, et queers. Nous n’oublions pas ce qui est fait à Lyon, ville gérée par Grégory Doucet (EELV) , où les expulsions se multiplient sous sa
mandature, où sa police municipale sert à réprimer les populations marginalisées.
L’antifascisme est une question primordiale, c’est même une question de survie. Il n’est plus question de faire les mêmes erreurs que cette sociale démocratie qui se meurt, avide de libéralisme. Il n’est plus question de négliger le travail de vigilance et de veille effectué par de nombreux·euses militant·es antifascistes, pour nos
libertés individuelles ou collectives.
Mobilisez-vous réellement pour faire un barrage efficace aux forces obscurantistes, aux groupuscules et aux partis d’extrême droite, et non à des fins électorales. Prenez l’exemple du front commun costarmoricain !
En attendant la suite, nous rappelons aux abonné·es que le CAM organise, le 7 juin prochain, à partir de 20 h, une nouvelle conférence sur les dangers de l’extrême droite et sur la pression qu’elle exerce dans nos écoles.