TRANSIDENTITÉ ET TRANSPHOBIE : RÉFLEXION AVEC DES MILITANT·ES TRANS DU PAYS LORIENTAIS

Dans le cadre du Mois du genre, nous allons évoquer deux sujets particulièrement importants, la transidentité, un chemin encore semé d’embûches, et la transphobie, attisée depuis de nombreuses années par des discours réactionnaires et haineux de certaines sphères de la gauche bourgeoise à la fachosphère.
En février 2010, le ministère de la Santé publie au Journal officiel un décret qui retire « les troubles précoces de l’identité de genre » de la liste des affections psychiatriques. L’Etat français devient ainsi le premier pays du monde à franchir ce pas, un espoir pous tous·tes. Il faut neuf ans pour que l’Organisation Mondiale de la Santé, l’OMS, suive le même cheminement.
Si en théorie, le décret s’applique, en pratique, il n’est toujours pas évident de trouver des praticien·nes compréhensif·ves. Énormément de médecins ou d’endocrinologues demandent toujours un suivi psy, « c’est pathologisant au possible » nous explique un·e militant·e lorientaise qui a entamé son parcours de transition.
Iel poursuit en soulignant qu’il « faut souvent se justifier sur le vécu, répondre à des questions intrusives, et quand obtention d’un rendez-vous médical, on sous-dose les hormones pour les femmes trans ». Les gynécologues ou urologues restent maintes fois inaccessibles. Bien sûr, il existe des initiatives et des sites qui répertorient les 
professionnel·les de santé LGBT-friendly, mais cela reste minoritaire dans les petites et moyennes villes.
Iel poursuit en expliquant que très souvent « il faut se justifier auprès des institutions pour changer de prénom ». Le discours dominant pousse encore énormément vers une transition par l’appareil d’État et par une forte pathologisation de la transidentité, obligeant les adelphes à s’astreindre au système qui les oppresse.
En rédigeant cette publication, en questionnant les personnes qui suivent une transition, nous avons écouté des voix teintées de sincérité, qui luttent pour un monde sans exploitation ni oppression.
Iels se battent pour le remboursement intégral par la sécurité sociale de tous les frais liés à la transition, le changement d’état-civil sur simple demande, la PMA vraiment pour tous·tes, l’arrêt des mutilations sur les enfants intersexes, et de manière générale contre les LGBTIphobies.
Où que ce soit, ce chemin est semé d’embûches, médicalement et institutionnellement, tout comme il l’est physiquement et économiquement. Alors lorsque Maud Royer, présidente de l’association féministe Toutes des Femmes, et autrice, est venue à Lorient, le jeudi 20 mars, elle a apporté un soutien optimiste. La militante et plaideuse pour les droits des femmes, des personnes trans et lesbiennes, était présente pour discuter avec une vingtaine d’étudiant·es, de militant·es trans et féministes.
Pendant un peu plus d’une heure, elle a échangé sur son dernier ouvrage, le Lobby Transphobe. Elle y décrypte l’offensive réactionnaire transphobe inédite qui sévit en hexagone depuis de nombreuses années attisées par la droite, l’extrême-droite, et les mouvements transphobes.
Appelant à déconstruire les idées reçues tout en se basant sur son parcours militant, Maud rappelle que cet ouvrage est « plus une analyse politique », lancée au cours de l’été 2023.
Les offensives anti-trans en Hongrie ou aux Etats-Unis se multiplient, sous la coupe de deux présidents d’extrême-droite, et attaquent chaque jour les mouvements queers ou criminalisent les militant·es. En août 2024, la Géorgie adoptait une loi homophobe. Le lendemain, la plus célèbre femme trans, Kesaria Abramidzé était retrouvée morte, tuée probablement par son compagnon.
L’apanage de la transphobie ne s’arrête cependant pas aux portes de la droite. À gauche, une minorité de féministes ainsi que quelques psychanalystes s’emparent également du sujet, menant ainsi une offensive anti-trans, soi-disant à des fins féministes ou enfantistes.
Les TERF (Trans Exclusionary Radical Feminism), bien que majoritairement hétérosexuelles, n’hésitent pas à instrumentaliser les lesbiennes à coups de phrases telles que « les lesbiennes n’aiment pas les pénis » pour exclure davantage les femmes trans y compris dans les espaces queers. Fatalement, les femmes trans sont privées de leur féminité, traitées comme des hommes déguisés en femmes pour assouvir leurs prétendus fantasmes et infiltrer les milieux exclusivement féminins. Pourtant, les femmes trans subissent tout autant de misogynie, si ce n’est plus, car elles subissent aussi de la transmisogynie que les femmes cis.
Pourtant, il ne faut pas perdre espoir ! Dans cette période qui peut paraître « incertaine, sur une ligne de crête » selon Maud Royer, il subsiste des alternatives viables : de la pair-aidance à l’auto-détermination, en passant par les comportements alliés. La pair-aidance offre un soutien précieux par celleux qui ont vécu des réalités similaires et qui sont plus avancé dans leur propre cheminement.
L’auto-détermination renvoie à la possibilité, pour une personne trans, de changer le sexe figurant sur ses papiers d’identité par une simple déclaration publique, sans avoir à le justifier par un avis médical ou apporter une quelconque preuve de ce changement. Les comportements alliés, nous semblent plus que cruciaux, car oui, nous soutenons, à La Combative, les personnes de différentes orientations sexuelles, identités et expressions de genre pour contribuer à leur bien-être et à une plus grande acceptation de leurs réalités.
Enfin, l’antifascisme, dont les comportements alliés, doivent se renforcer avec la présence dans les luttes des personnes trans. Elle est une force motrice pour nos combats communs !